Ce n’est plus qu’un vieillard, qu’une infirmière pousse dans une chaise roulante et qui dissimule son visage dans la salle d’audience du tribunal de Hambourg. Il se dit » exténué et très affecté ». Il s’appelle Bruno Dey. La justice allemande lui reproche d’avoir été le dernier surveillant SS du Strutthof, en Pologne. Un camp d’extermination nazi où 65 000 prisonniers moururent du typhus, gazés ou d’épuisement.

Un procès surréaliste
En Août 1944, Bruno Dey avait 17 ans. C’est lui qui entre 1944 et 1945, a gardé le camp. Il a vu arriver, sans repartir, des milliers de prisonniers. Il connaissait leurs conditions de détention. Mais il n’a rien fait.
Alors, le tribunal questionne, interroge. Les juges veulent déterminer sa part de responsabilité. Surveillait-il le camp par adhésion au nazisme ? A-t-il tué des prisonniers ? Comment ? Et combien ?
Bruno Dey répond, se défend. Il prétend avoir été incorporé de force par les SS. S’il a bien entendu des cris venant de la chambre à gaz, il assure, en revanche, ne pas avoir participé au gazage des prisonniers. Lui, il n’a jamais voulu faire de mal à personne. Ce qu’il a fait, on l’a contraint à le faire.
J’aimerais m’excuser auprès de ceux qui ont vécu l’enfer de cette folie. Ce qui s’est passé ne doit jamais se reproduire. Mais je refuse d’endosser la responsabilité des crimes ».
S’il n’est guère convaincu, le tribunal n’oublie pas qu’à l’époque, Bruno Dey avait 17 ans. Aurait-il pu se rebeller? « Vous n’auriez pas dû participer à ce qui s’est passé au Stutthof » lui rétorque la présidente , le ramenant aux choix de tout individu.
Au verdict étonnant
A l’issue de neuf mois de procès, au cours desquels de nombreux témoins déposèrent, Bruno Dey fut condamné à deux ans de prison avec sursis.
Certes, un verdit étonnant. Mais soixante-seize ans après les faits, et à l’âge de quatre-vingt-treize ans, une autre condamnation eut-elle eu un sens pour le prévenu ? Pour ses victimes ? Pour la société et le monde entier ?
A vous de juger.
Qu’aurions-nous fait à sa place ? Protester et aller rejoindre les autres dans la chambre à gaz ?
Qu’aurait-il pu faire pour aider ces pauvres gens ? A mon avis, rien.
N’oublions pas le contexte : Dans les deux camps, les déserteurs étaient exécutés.
Si j’avais été à sa place, je n’aurais sûrement pas pu supporter cette horreur. Peut-être que j’aurais profité d’une permission pour m’enfuir et me cacher loin de cette folie, en espérant n’être jamais rattrapé… Mais quelqu’un d’autre, plus ou moins volontaire, aurait pris ma place.
La vraie question est : Était-il un nazi actif ou était-il contraint par peur ? Seul lui le sait et personne ne pourra rien prouver.
La décision du tribunal ne m’étonne pas.
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La clémence du tribunal m’agace un peu. Les familles des victimes durent se sentir trahies.
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Et si ce jeune de 17 ans avait aussi été une victime du nazisme ?
Mon grand-père paternel est passé par deux camps de concentration (une fois évadé et l’autre fois libéré). Il était dans la Résistance ardennaise. Mon grand-père maternel était dans l’armée régulière. Il a perdu un poumon, transpercé par une balle. Pourtant, ce lourd passé ne doit pas occulter la présomption d’innocence, ou plutôt de non-choix face à la terreur.
Quand un mafieux donne le « choix » à quelqu’un de tuer un prisonnier ou d’être lui-même exécuté, ce quelqu’un est-il un assassin ? (d’un point de vue moral, et non pas pénal)
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Le doute doit profiter à l’accusé.
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17 ans. Il était donc mineur au moment des faits. A la fin de la guerre, on a incorporé tout le monde et n’importe qui dans la SS. Et sans demander l’avis de personne. De plus, on n’a aucune preuve, aucun témoignage de sa participation active. Il était là par force et n’avait certainement pas la possibilité de refuser d’être là. A moins d’entrer dans la clandestinité.
Ce procès a condamné la chose pas l’homme.
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Justice est passée. Le prévenu a été condamné. Mais pour beaucoup, ce procès laisse un goût d’inachevé.
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Je ne jugerai en rien quoi que ce soit, qui que ce soit, mais un jugement a cet « intérêt » de mettre les faits en évidence. Juger ne fera pas revenir les disparu ni effacer cette abomination d’un systeme qui institue justement des polices, des tribunaux, des usines, des outils logistiques pour détruire, la Nature, détruirel’humanité, et semer la terreur et la mort, propager les souffrances par le seul fait du pouvoir, du fait d’espérer et de croire, d’attendre et de chercher…
C’est juste à pleurer que de vivre encore aujourd’hui les mêmes (juste en pire) atrocités
Merci Néra pour cette actualité réflexive…
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Non, ce qu’on vit n’a rien, mais strictement rien à voir avec le nazisme. Il faut raison garder.
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Foisonne très simplement que cette abomination actuelle et sciemment organisée n’est pas encore nommée, comme pour chaque horreur en son temps…
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*Disons très simplement (…)
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Bon jour,
93 ans. Il avait 17 ans. La seule condamnation possible : les remords qui rongent …
Max-Louis
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Pas mieux. Je n’envie pas son sort.
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Le métier de juge n’est pas toujours simple… Peu importe la solution elle me « dérange » mais on a d’autres choix que de l’accepter. Merci pour ce rappel des faits et nous rappeler les atrocités que le monde a vécu et que nous ne devons plus jamais perpétrer !
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Ne jamais oublier. Pardonner, le peut-on ?
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